mardi 9 août 2011

Damour (et d'eau fraîche ?)

Seconde sortie à Damour, cette fois j'évite soigneusement le terrain militaire côté plage. Entre les plantations (bananes et vergers), en contrebas de la route qui mène à Deir el Qamar, je m'engage sur une petite route sans issue et remonte le lit du "fleuve". Si un mince filet d'eau s'écoule encore vers la mer, il faut faire quelques centaines de mètres pour trouver un milieu humide à proprement parler. Ce qu'il reste d'eau à cette époque est retenu par un barrage de pierres, dont l'efficacité est accrue par les détritus qui le recouvrent (plastiques de toutes sortes, bouteilles, pics à brochettes, tuyaux de narguilé...) 

Qu'importe, l'endroit semble favorable malgré tout et les humains rencontrés jusque-là sont accueillants. Des dizaines de libellules (voir ici), des grenouilles, quelques Bulbuls et Prinias, une Pie-grièche masquée. Des mouches étranges aux yeux verts fluos.

Orthetrum chrysostigma ?


Il fait relativement bon, la matinée promet de l'être. Je ne tarde d'ailleurs pas à entendre un cri inédit... L'Alcyon pie a été signalé ici il y a quelques temps, aurai-je la chance d'en observer ? Cela pourrait coller en tout cas !

Les points d'accès à la retenue d'eau ne sont hélas pas très nombreux. Par le lit asséché, on est à découvert et à contrejour. Je trouve deux percées dans la roseraie, la première étant manifestement un Hammém, comme on dit ici (i.e. toilettes, ne pensez pas qu'on y vient pour prendre des bains chauds) ! 
Me reste la seconde, qui offre une visibilité réduite d'où l'on peut observer les nombreux odonates (voir le post dédié mis à jour). Pas même le temps de l'asseoir, un Martin-Chasseur de Smyrne (Halcyon smyrnensis) me passe devant ! Il m'a vu et s'enfuit en remontant le fleuve. Une seconde suffit à l'identifier : beaucoup plus grand que son cousin le Martin-Pêcheur d'Europe, la tête brune, le dos et la queue bleu électrique et de larges miroirs blancs sur les ailes. 

Bon, pour la coche, c'est fait... mais j'aurais aimé en voir un peu plus malgré tout. Impossible d'aller plus loin, deux chiens très dissuasifs et heureusement enchaînés me barrent la route vers le haut de la vallée. Je retourne donc à mon "observatoire", en espérant contacter mon oiseau, au moins à l'oreille... Un minute ou deux s'écoulent où Orthétrums, Crocothémis et Trithémis viennent se chamailler, se poser, s'accoupler et pondre autour de moi. 

Gerris
Soudain, des détonations sourdes et puissantes se font entendre derrière moi et rebondissent dans la vallée. Hm hm... Maintenant c'est un autre bidule capable de vol stationnaire, mais beaucoup plus bruyant que les odonates locaux qui s'approche et me passe au-dessus. Le bruit effraie une petite Couleuvre tesselée qui s'enfuit le long de la berge opposée.

Couleuvre tesselée
L'hélicoptère de l'armée tourne maintenant au-dessus de la vallée. Je décide de me mettre à découvert, en espérant que ne lui viendra pas l'envie soudaine de pondre dans la rivière, auquel cas c'en est fini de moi !

Tout bien considéré, il tonitrue mais ne doit pas en avoir après moi... Deux hommes et un enfant descendent d'une voiture, ne lui prêtant aucune attention. Ghazi (comme je ne vais pas tarder à l'apprendre) me dit de ne pas m'inquiéter au sujet de l'engin volant. Bon. Il me taille un peu la bavette et je dois rapidement éluder un certain nombre de questions personnelles parmi le répertoire inquisiteur habituel libanais. Il est cependant sympathique, très courtois et me conseille, pour finir, de traverser la rivière pour trouver un meilleur point de vue. Adios ?

En suivant son conseil, je me retrouve de l'autre côté. La vue sur la vallée est certes meilleure mais on est un peu loin. J'ai le malheur de me garer devant une maison construite à côté de la route qui mène au Chouf... qui se trouve être celle de Ghazi, qui d'ailleurs rapplique et m'invite à entrer. Je ne peux plus esquiver !

Inutile de vous rapporter l'intégralité de notre discussion, les présentations de sa fille et de son fils... Mes capacités en arabe m'étonnent moi-même et je papote presque une heure malgré moi. Autour d'un chocolat chaud (il ne boit pas de café). J'ai tout de même un peu la nausée lorsqu'il sort fièrement de son congélateur les sacs plastiques contenant le fruit de sa chasse personnelle. Sans pouvoir identifier toutes les espèces qu'il a tenté de me décrire (il les a tout de même plumés avant de les congeler), parmi elles se trouve le Loriot d'Europe, dont il imite maladroitement le chant flûté. D'ailleurs, il reste quelques plumes jaunes vif sur celui qu'il me montre, "c'est pour la soupe", me dit-il. "Ils aiment particulièrement les mûriers et les néfliers". Au moins j'aurai appris cela.

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